Le sang
Bon nombre d’affections sont considérées comme une altération de la qualité du sang ou de sa libre circulation dans le corps. Alimentation et sang sont étroitement liés, comme le révèlent les expressions vernaculaires «sang de navet», «sang trop épais» ou «trop fort», «sang faible», «ne pas avoir de sang»,...
Les dépuratifs et fortiants
Constamment le sang se doit d’être purifié. Les soins dépuratifs sont en grande partie tributaires des saisons et de leur impact sur le corps humain: «Parce qu’au printemps, on est travaillé par le changement de saison, tout ça, ça vous retourne le sang. La Pensée sauvage, en cure c’était pour ça, pour le sang». Outre les nombreuses cures dépuratives, il convenait de prévenir toute dégradation de la qualité du sang. Aussi, après un choc, véritable traumatisme affectant l’ensemble du corps, est-il recommandé de se dépurer. Un informateur nous rappelle avoir consommé de la «Pensée sauvage en infusion lors d’un choc, une fêlure à la tête». Également, il était d’usage de «fortifier le sang»: «Ma mère donnait du broux de Noix aux enfants au printemps, pendant plusieurs jours». Le sang étant perçu comme le support véhiculant les maladies, sa force est supposée agir contre la propagation des pathologies.
Les boutons
«Encrassement», «faiblesse du sang» ou «signe d’adolescence», les «boutons» sont l’objet de traitements dépuratifs. Ils recouvrent souvent des formes d’acné, traité par les cures de Pensée sauvage ou de Bardane. Le vertueux Pissenlit permet aussi de lutter «contre l’encrassement du corps».
Eczéma, psoriasis et impétigo
L’ensemble de ces maux traduit un déséquilibre de l’état du sang, souvent imputé au régime alimentaire, notamment quant à l’eczéma. Dans ce cas sont employées les cures de décoction de racine de Bardane ou de Pissenlit. Dans le Bassin Minier, il est rapporté que «la Mère Mondange» faisait des pommades avec les racines de Scrofulaire noueuse que l’on «passait sur l’eczéma» et «deux jours après c’était guéri». Les applications de décoction d’écorce de Chêne résorbent l’eczéma ou le psoriasis «parce qu’il y a beaucoup de tanins, c’était ce qui brûle les maux». Le Chèvrefeuille favorise la régression de l’impétigo sur lequel «on passe les fleurs infusées».
Les furoncles et anthrax
Ces affections sont souvent perçues comme l’expression d’un «mauvais sang», «sang faible», ou «vicié». De nombreux traitements à visée dépurative sont mis en œuvre. Pour soigner la furonculose sont développées les cures de décoction de Bardane, de «Sang de dragon» ou Patience sanguine. La macération de Livèche ofcinale dans un litre de vin blanc est un remède habituel, à boire le matin pendant 8 jours. Parallèlement, des soins externes sont prodigués. En Bresse est connu l’usage des feuilles de Lierre terrestre: «On les coupe en petits morceaux. On mélange avec une cuillère de crème, du savon râpé, de la mie de pain. On pétrit jusqu’à obtenir une pâte que l’on applique sur les furoncles. Le remède est encore utilisé». La Vigne est indiquée dans l’Auxois: «Mettre du miel sur une feuille de Vigne et appliquer sur les anthrax, les furoncles, ça tire le germe». Dans le Morvan, les cataplasmes de feuilles de Tussilage sont reconnus pour leurs propriétés émollientes.
Les verrues
«C’est quelque chose dans le sang qui fait sortir les verrues», dit-on parfois. Certains parlent de «virus dans le sang», ou encore de «sang faible». Qui n’a pas entendu louer les mérites de l’Herbe à la verrue, la Grande Chélidoine, dont on applique le suc jaune des feuilles ou des tiges fraîches sur les verrues? Riches en suc caustique, l’Euphorbe réveille-matin, le Géranium herbe à Robert, la Joubarbe des toits et le Sédum âcre sont également cités. Toutefois, leur emploi n’est pas sans danger: «C’est un Géranium sauvage, il y a du lait dedans qu’on met sur les verrues. Certaines personnes l’acceptent, d’autres non et pour lesquelles ce n’est pas conseillé. Ça a de petites fleurs roses. Ça pousse dans les murs. Dedans, il y a un liquide un peu orangé... C’est poison! ». En Auxois, un informateur recommande le blanc de Poireau: «Fallait frotter. J’en ai jamais r’eu de ma vie! ». En Morvan, une autre technique consiste à inciser la verrue et à y introduire du jus d’Ortie. Enfin, on frottait aussi les verrues avec les fleurs de Millepertuis.
L’Aubépine.
La circulation du sang
«Sensation de froid», «sang trop épais», «lourdeur», «engourdissement», «douleurs» et «douleurs de femmes»,... appellent les remèdes qui rétabliront la circulation du sang. Couramment prescrite en médecine populaire, l’infusion de feuilles de Cassis favorise la circulation du sang. En réponse à «la mauvaise circulation», un panel d’infusions offre diverses possibilités: Prêle, feuilles de Cassis ou de Noyer, fleurs de Violette odorante ou de Sureau noir, sommités fleuries de Fumeterre officinal, d’Origan marjolaine, de Reine des prés, de Serpolet ou de Verveine officinale.
Remède à large spectre thérapeutique, l’Aubépine est préconisée «pour la circulation, le cœur, la tension». Outre à but curatif, «on buvait de l’Aubépine pendant 4 à 5 jours pour la circulation, un peu en prévention». En infusion, l’Armoise commune et la Mélisse officinale sont les remèdes majeurs de la circulation féminine. Les cataplasmes de feuilles de Chou, les infusions d’Armoise commune ou de Mélilot officinal, ainsi que les bains de pieds dans une infusion de fleurs de Sureau noir combattent «les lourdeurs des jambes». Dans le cas d’œdème, le malade baigne la partie atteinte dans une décoction de feuilles de Noyer. Consommée à petite dose, la macération de baies de Genévrier dans l’alcool soulagerait également ces douleurs.
Les hémorroïdes
En bain de siège, les décoctions de feuilles et racines de Millepertuis perforé ou de feuilles de Bardane atténuent les hémorroïdes. S’emploient encore les fleurs de Sureau noir ou de Germandrée petit-chêne: «Ma mère prenait beaucoup de petit-chêne pour les hémorroïdes. C’était calmant et décongestionnant, ça la soulageait. Elle devait faire des décoctions d’un quart d’heure environ pour faire des bains peut-être une fois par jour». Un autre témoignage confirme le bienfait des bains de siège: «Mon grand-père souffrait terriblement d’hémorroïdes. Il éprouvait un grand soulagement en prenant des bains de siège dans une source d’eau vive, bordée de Boutons d’or (Ficaire) ». Des pommades de fabrication familiale étaient élaborées à partir de tubercules de Ficaire ou encore de racines de Scrofulaire noueuse: «Faire cuire longtemps les racines plusieurs heures ou une journée dans le saindoux, sur la cuisinière à charbon. Recueillir le dépôt. On le mettait dans des pots en grès, puis dans des pots de crème Simon. La mère Mondange en distribuait partout. Elle est morte il y a 25 ans. Elle n’avait pas donné le secret de sa fabrication. Cette plante, mon père l’appelait l’Herbe de la mère Mondange». En fumigation, l’écorce du Sureau noir se révélait d’un effet salutaire: «Râper l’écorce du Sureau. La faire bouillir. Poser les fesses au-dessus de la fumigation». Une pratique symbolique consiste à «mettre un Marron d’Inde, voire trois, dans sa poche». À l’image de la Théorie des Signatures, le Marron d’Inde, tout comme les racines de Ficaire, évoquent l’aspect des hémorroïdes.
Le Ficaire
La tension
Imputée au dysfonctionnement du cœur ou des vaisseaux, la tension fait l’objet de pratiques tant préventives que dépuratives. L’Ail est le médicament populaire de la tension. Il se consomme sous diverses formes, notamment en soupe: «Vous mettez une Pomme de terre et une tête d’Ail. Fallait enlever le germe. Vous faites cuire votre soupe et vous écrasez tout. C’était recommandé pour la circulation du sang, pour la tension». Dans certaines contrées, l’Ail occupait une place de choix au sein des pratiques alimentaires: «Le matin, on fait le pain «docé», frotté avec l’Ail et recouvert de beurre». Ou encore: «Dans le temps, on mangeait de l’Ail bien plus que maintenant. Tout le monde en mangeait. À quatre heures, on en mangeait avec le fromage! ». D’autres simplement «mâchonnent de l’Ail, le matin à jeun». On peut aussi «faire macérer de l’Ail en morceaux dans de l’alcool fort et prendre un verre à jeun tous les matins». Les infusions de fleurs d’Aubépine, de feuilles d’Olivier, de Sauge officinale ou de Gui sont recommandées. Ce dernier s’utilise encore de la façon suivante: «Il faut 30 feuilles de Gui qu’on cueille sur les boules de Gui, sur les Pommiers. Vous faites bouillir dans un verre d’eau environ 10 minutes. On met la décoction dans un litre et on remplit de vin blanc. On boit un verre à liqueur tous les matins. Ça fait baisser la tension. C’est une recette que ma sœur m’a donnée à Auxonne».
«Pour le cœur»
Organe central de la circulation, le cœur occupe pourtant dans la thérapeutique populaire une place bien moindre que celle du «sang». Toutefois, diverses pratiques médicinales sont développées «pour le cœur», «pour les personnes cardiaques», «pour les palpitations» ou «pour le risque d’angine de poitrine».
Panacée indéniable, l’Aubépine jouit d’une popularité sans conteste dans le traitement des problèmes cardiaques. Néanmoins, il en est fait usage avec parcimonie: «L’Aubépine pour le cœur, il ne faut pas en prendre beaucoup. Il faut en mettre peu pour en faire une tisane. Et il ne faut pas en prendre longtemps». Certains suivent le traitement 15 jours par mois «quand le cœur bat anormalement» ou bien «en cas de tachycardie». On tire aussi partie des propriétés de l’Aubépine sous forme de liqueur. Autre plante citée principalement dans le Morvan où elle croît généreusement, le Genêt à balai s’emploie «pour le cœur», à raison de 4 ou 5 fleurs séchées par tasse. Là encore, il est conseillé d’en user avec modération, tout comme le Gui indiqué à son tour dans les maladies de cœur. Dans le cas de «battement de cœur après les repas», l’infusion de Grande Camomille apporte son concours à travers ses propriétés digestives et calmantes.
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